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OPERA MULTI STEEL // D’une Pierre deux Tombes


Jo&Jean

Opera Multi Steel est un groupe cold wave/gothique/baroque/médiévale de Bourges qui s’est formé en 1983, soit bientôt 40 années passés sous la brume et dans les cathédrales (le mot Cathédrale est le titre de leur premier album en référence à la cathédrale de Bourges) avec vue sur le cimetière. Malgré les années, le trio est resté fidèle à son line up, soit Franck Lopez (voix, guitare, basse, synthés), son frère Patrick L. Robin (voix, flûte, mélodica) et Catherine Marie (synthétiseurs, basse, voix), ainsi qu’à son style musical. La preuve avec la sortie du douzième album au titre explicite, D’une Pierre deux Tombes et les photos de la pochette qui montrent des œuvres gothiques religieuses en provenance de pierres tombales sculptés au XIXème siècle. Comme une obsession avec la mort, le noir, le recueillement, encore aujourd’hui les morceaux ont pour titres : Jardin du souvenir, Cimeterre, Les Immortelles, L’après-mort et en bonus sur le CD Sérum de l’Humanité avec un air d’Étienne Daho dans la voix. Justement, sur Pistes Noires, l’album tribute/hommage à Daho, Opera Multi Steel reprend le morceau Bleu comme toi, extrait de l’album Pour Nos Vies Martiennes (1988). Le lien avec la mort, le recueillement est ici encore plus prononcé, car les trois membres du groupe ont perdu leurs mères en 2018, ainsi l’album est un hommage posthume à leurs mamans. A noter que sur la version CD de l’album, après chaque titre, on entend le son du vieux coucou familial, celui qui était sur le mur de la mère de Patrick et Franck. On y entend également le dernier enregistrement vocal adressé à Franck par sa mère. Le deuil est le ciment de ce nouvel album tombal.

Si au courant des années 80, il y avait de nombreux groupes français qui brassaient de la musique cold (Seconde Chambre, Trop Tard, Asylum Party, Rosa Crux, Résistance, Clair-Obscur, Guerre Froide, Norma Loy et Collection D’Arnell-Andréa qui est l’autre groupe avec Franck Lopez), au fil des années d’autres styles musicaux ont pris le relais chez les groupes d’ici (noise, HC, garage rock, électro). Mais Opera Multi Steel tient bon, sans heureusement tomber dans sa propre caricature. Faire de la cold porté par le médiévale, le religieux quand on a 20 ans, cela fait partie de la mélancolie qu’on disperse dans notre jeunesse, face à l’entrée dans le monde adulte lié au travail, à fonder une famille, à devenir une personne responsable. La musique gothique et punk, permet de retarder ce passage vers les responsabilités à assumer. D’autant que les titres des disques tous format du trio (parfois quatuor) n’ont pas hésité à travers les décennies, à utiliser des phrases, mots, bien connotés gothique, la jeunesse qui s’enfuie : Eternelle Tourmente (1986), Je regarde la pluie (1987), Regret qui s’écaille (1989), Les douleurs de l’ennui (1990), Les Martyrs (1991), Mélancolie en prose (2013). Bref, nos trois quinquagénaires prouvent avec ce nouvel album, que le genre « musique gothique » tient bon en 2022, toujours avec grâce et style. Oui, cet album et sa poésie funèbre (macabre ?) permet de nous échapper de notre quotidien, comme le plaisir d’admirer une œuvre de Francis Bacon ou un film de Guy Madin. On prend plaisir à écouter les huit morceaux du vinyle ou douze morceaux pour la version CD, de cet album aux couleurs des années 80, tout en gardant un pied, non pas dans la tombe, mais dans l’époque actuel. Notamment avec ici et là des sons électroniques qui dynamisent le spleen intemporel des compos d’Opera Multi Steel… toujours debout et fier, non pas de rien faire (ref. le tube des Olivensteins) mais d’être aussi inspiré par le travail créatif.

Paskal Larsen


D'une Pierre deux Tombes

(Meidosem Records/Wave Records) // 2021.



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