Pour la soirée d’ouverture de la 29e édition de la Route du Rock, les festivaliers avaient rendez-vous à La Nouvelle Vague, bien au chaud et au sec avant de braver les éléments dès ce jeudi au Fort de Saint-Père.
20h30. C’est Anna St. Louis qui arrive la première sur scène, seule à la guitare, dans une ambiance quasi champêtre très poétique (des bouquets de fleurs coupées habillent la batterie et les micros déjà prêts pour le set de Big Thief à suivre). Sa voix douce et sa guitare caressante nous embarque immédiatement vers des paysages lumineux qu’on imagine être ceux du Kansas dont Anna St. Louis est native. Iconique, ses longues boucles auréolant son visage, Anna déroule avec grâce un set mêlant les titres de son premier album, « If Only There Was A River » sorti en 2018, et des morceaux plus anciens, dans un dépouillement d’effet très efficace n’étant pas sans rappeler les débuts de Chan Marshall. Au détour d’un inédit, Anna nous confie que c’est sa deuxième venue en France et qu’elle se réjouit de cette soirée « pretty exciting ! ».
21h30. Les réjouissances continuent justement tout en prolongement et en rupture avec Big Thief. La formation new yorkaise investit la scène. Si les fleurs coupées conféraient aux ballades oniriques d’Anna St. Louis un supplément de décor, elles deviennent à présent un ingrédient de magie. Le set de Big Thief s’ouvre avec un solo d’Adrianne Lenker à la guitare, dont la voie aérienne semble portée par les regards attentifs de ses comparses : Buck Meek (guitare), James Krivchenia (batterie), Max Oleartchik (basse). Très vite on ressent l’esprit de corps du band, leur sensibilité propre et commune apparaît comme une évidence. Le folk délicat des premiers morceaux devient rageur avec Shark Smile. Adrianne Lenker chante le plus souvent les mâchoires serrées, comme pour filtrer des émotions qui sans quoi seraient peut-être trop dévastatrices. Elle étire les mots, elle étire les notes de sa guitare, tendue, engagée jusqu’à l’extrême. Et même lorsque les expérimentations folk de Big Thief redeviennent apaisées, le chant d’Adrianne Lenker demeure incantatoire (From). Peu diserts (mais leur musique n’en dit-elle pas assez ?), c’est Adrianne Lenker qui remercie le public, remercie Anna St. Louis
« pour son set magnifique et confie avec pudeur être ravie de voir Sharon, une amie proche, qui a longtemps été une source d’inspiration ». Leur set se termine avec Forgotten Eyes, morceau du nouvel album à venir en octobre. Big Thief a ravi nos âmes, le temps d’offrir quelques bouquets de fleurs au public, les voilà partis tandis que nous frissonnons encore de leur univers rock-folk intense.
23h00. L’ambiance semble se faire trip hop lorsque Sharon Van Etten rejoint ses musiciens, conformément au virage electro pop pris dans son cinquième album, Remind Me Tomorrow. La couleur est annoncée avec Jupiter 4, qui se ponctue d’un « My love is for real » le poing levé. La voix envoutante de Sharon Van Etten est quasi hypnotique. Elle-même concentre les regards, séduisante, charmeuse, elle danse et saisit sa guitare pour une volée de titres plus folk (You Shadow) qui rappellent immanquablement l’adn de cette soirée d’ouverture. Le son de Sharon Van Etten sait aussi se faire plus saturé (I Told You) et énergique avec son titre phare Seventeen, où elle harangue le public, charmé. A son tour, elle remercie Anna St. Louis et Big Thief, se dit « très heureuse de partager le plateau avec Adrianne et son groupe, dans cette ville et cette salle magiques », nous confie que Every Time The Sun est le titre préféré de sa mère et boucle son set avec l’affectueux Stay.
00h10. La soirée d’ouverture de la 29e édition de la Route du Rock s’achève sous de somptueux hospices. Comme s’il fallait le rappeler, le folk fait bien partie du rock et qu’un grand festival rock ouvre sur une soirée 100% féminine et rock-folk en dit long sur la puissance contestataire qui caractérise le genre.
Veyrenotes & Wunderbear
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